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My Fair Lady

13 décembre 2013
Théâtre du Châtelet
Frederick Loewe et Alan Jay Lerner
Direction musicale : Jayce Ogren ; Mise en scène : Robert Carsen ; Eliza Doolittle : Katherine Manley ; Professor Higgins : Alex Jennings ; Pickering : Nicholas Le Prevost ; Doolittle : Donald Maxwell; Freddy: Ed Lyon.

 

I could have danced all night reste sans doute la phrase la plus connue de l'œuvre et en tout cas me concernant j'aurais pu sung all night en sortant du Châtelet, même ces chansons que je ne connaissais pas ou peu avant de venir.

 

Cette comédie musicale a le grand mérite de ne pas être une œuvre attendue à l'eau de rose où les amoureux se courent après pendant trois heures avant d'être réunis dans les derniers moments. Non, elle dépasse le cadre habituel du genre pour traiter des problèmes de société que G B Shaw voulait dénoncer: les accents anglais comme reflets et séparations des classes britanniques. En entendant deux mots, Higgins est capable de savoir que la mère d'un tel est gallois et qu'il est né près de Bristol d'un père alcoolique.

 

J'avais étudié la pièce de Shaw, Pymalion, qui n'a pas grand chose de drôle à l'exception de cet éternel bachelor tout bougon. La fin de la pièce ne m'avait pas choqué, Eliza finissait avec Freddie, le fils de bonne famille, et elle ne parlait plus au professeur. Pour parfaire sa création, Higgins devait la libérer et ne plus la toucher. Dans la comédie musicale le message est tout autre puisque nous ne doutons pas un seul instant qu'Eliza reviendra au bercail. Seuls quelques instants de mélancolie dans l'épisode chez Mme Higgins nous laissent des soupçons.

 

C'est bien plus réjouissant d'avoir une histoire qui finit bien pour les fêtes, même si ca ne semble pas tout à fait une histoire d'amour. Les seuls moments amoureux sont entre Freddie et Eliza, mais ringardisés à de la fleur bleue. Ed Lyon réussit impeccablement le rôle de l’eligible bachelor au sourire Colgate qui ne sait pas ce qu'est le travail. La réflexion sur comment est vu l'amour est donc plutôt complexe: on se moque du coup de foudre et on vend la soumission d'une femme à son désagréable créateur qui garde un cœur de pierre jusqu'au dernier moment.

 

Qu'importe ceci, l'important est de voir un beau spectacle, et là tout est réussi. Malgré le nombre d'œuvres que j'ai pu voir mises en scène par Carsen, je reste toujours ébahi. D'Elektra à My Fair Lady, l'esthétique reste poignante (pardon pour la réunion de ces deux œuvres aussi différentes qu'une serviette d'un poisson rouge), ne laissant aucun détail de côté. Les couleurs se mélangent dans un univers entre-deux guerres tout aussi traditionnel que glamour. Les décors sont suffisamment riches pour qu'on ne se lasse pas ceux qui reviennent plusieurs fois.

 

Je trouve la scénographie du salon de Mme Higgins particulièrement réussie, tout en blanc et blanc cassé, avec ce long rideau plissé, en arc sur l'avant scène, ce mobilier qui mélange modernité et classicisme, aboutissant à cet oiseau du paradis de Brancusi en fond de scène.

 

L'excellence se retrouve aussi dans la distribution, British et brillante du début à la fin. Katherine Manley, déjà vue dans The Sound of music ici même, se glisse très bien dans le personnage. Si elle n'est pas à proprement dit séduisante, elle est très élégante dans sa robe de bal. Elle s'amuse avec la partition et ces changements de langage, qui paraissant moins prude que Hepburn dans le film.

 

Higgins est très bon en jouant le sans cœur plein d'humour très British avec une voix plutôt nuancée qui oscillent entre le parlé chanté et le chant réel, avec son double à la sexualité ambiguë Pickering. Les chœurs sont aussi bons danseurs que chanteurs, entrainant des moments charmants autour d'Alfie Doolittle, de purs instants de comédie musicale pour le Get Me to the Church on time.

 

Une histoire loin du superficiel, un cast pointilleux et une belle mise en scène, le tout regroupé sous la direction enjouée de Jayce Ogren, un bien joli spectacle pour Noël de retour à Paris après avoir fait escale dans son autre maison, le Mariinsky de St Pétersbourg.

 


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