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La Dame aux Camélias #1 (Letestu/Bullion)

Opéra de Paris

Palais Garnier

21 septembre 2013

Marguerite : Agnès Letestu ; Armand : Stéphane Bullion ; M. Duval : Michaël Denard ; Prudence : Nolwenn Daniel ; Le Comte : Simon Valastro ; Nanine : Christine Peltzer ; Manon Lescaut : Eve Grinsztajn ; Des Grieux : Christophe Duquenne ; Olympia : Myriam Ould-Braham ; Gastion Rieux : Nicolas Paul

 

Dumas, Verdi .... Neumeier. À voir ce ballet, je me dis que cette histoire fait décidément beaucoup parler d'elle, avec à chaque fois autant de poigne, pourtant sous des aspects bien différents. La courtisane malade qui trouve l'amour mais le père du jeune homme implore la jeune femme qui retourne alors à ses occupations antérieures avant de mourir dans la solitude.

 

Chaque artiste ayant exploré différemment la dramaturgie initiale, Neumeier choisit de revenir à la source: que s'est-il réellement passé entre Armand et Marguerite? Suspens insoutenable certes, mais dont les réponses se trouvent dans le roman plus que dans la pièce de théâtre: Armand était en voyage à l'étranger lors de la mort de celle qui était devenue comtesse ; il avait succombé aux charmes d'une amie de Marguerite. Et ici nous insistons sur la comparaison avec Manon et Des Grieux qui parait tout d'un coup si évidente. Quelques modifications donc par rapport à l'histoire de Traviata.

 

Tout comme Roland Petit qui choisit la musique de Bizet pour son Carmen, il aurait été facile pour Neumeier de prendre des extraits du chef d'œuvre de Verdi pour accompagner son ballet. Que nenni, de nouveaux personnages, une intrigue en partie remaniée, il faut trouver autre chose. Cela ne m'empêche pas de voir çà et là des images sorties de Verdi, quand Marguerite/Violetta donne un camélia à son jeune amant (ebben, domani) ou encore quand Duval/Germont vient demander à la courtisane d'abandonner son fils. La musique sera donc du Chopin, accompagné d'un orchestre pour vivifier l'ensemble, notamment des valses, dont la Brillante de Dances at a gathering.

 

En sortant d'une répétition de ce ballet, je m'étais réellement demandé quelle idée j'avais eue de prendre trois dates. J'avais l'impression (à l'inverse d'autres) de voir un Onéguine réduit. Au bout du compte, en voyant l'œuvre dans sa pleine version spectacle, je me dis effectivement que cela me rappelle Onéguine.... mais en mieux! Là où parfois le bal du dernier acte du ballet de Cranko me fatigue un peu, je n'ai pas trouvé un moment qui m'ennuyait chez Neumeier. Alors oui l'œuvre est longue, mais je ne saurais pas où couper. [Pour la liste de comparaisons des ballets néo classiques Onéguine-Manon-La Dame, nous vous préparons quelque chose avec blog à petits pas.]

 

Entrons (enfin) dans le vif du sujet, les interprètes. Letestu disait qu'elle y avait trouvé le rôle de sa vie, et je vois bien qu'elle s'y sent tout à fait naturelle, notamment avec son partenaire de longue date Stéphane Bullion. Elle vit pleinement la dramaturgie, et tout aussi actrice que danseuse. Lorsqu'elle souffre, j'y crois.

 

Évidemment la chorégraphie n'est pas des plus simples, notamment quand Marguerite passe de partenaire en partenaire. Lorsqu'elle se retrouve portée par Alexis Renaud, elle a l'air un peu tendue. Quand je la vois prête à danser avec Valastro, c'est moi qui me tends. Mais dès qu'elle se retrouve avec Bullion tout semble bien aller. Sa taille lui confère une telle grâce qui la magnifie et la sanctifie presque dans un tel rôle. Chacune de ses intentions, palpables à la vue de ses mains, de ses pieds, laissent montrer qu'elle est bien au top de sa forme et qu'il est bien dommage qu'elle quitte la compagnie à la fin de la série.

 

Les pas de deux sont nombreux et fatigants, et pourtant elle ne montre pas de signes de fatigue. Je sens qu'elle a voulu donner le meilleur d'elle même pour ces représentations. Jusqu'au pas avec Mickael Denard, qui commence d'ailleurs à fatiguer, elle est attendrissante et réussit à calmer l'état du vieil homme qui finit par voir une fille en elle. Si leur pas de deux n'est pas particulièrement gracieux, je trouve que ce décalage colle tout à fait avec l'histoire.

 

Bullion quant à lui fatigue plus vite, assis devant lui au parterre, je le vois suer et respirer fort, le rôle est usant. Je trouve qu’il le danse très bien, le partenariat fonctionne c'est certain. Il est juste dommage qu'il ne travaille pas davantage sa dramaturgie. Il ne sourit....jamais. Il n'a jamais l'air étonné, heureux. La tristesse éventuellement lui va bien. Quand il doit paraitre énervé lors de la représentation de Manon Lescaut, il se contente de partir sans réaction furieuse. Mais bon, je trouve qu'il est naturellement charismatique donc ca rattrape un peu, tout à la fois imposant, séduisant et fragile.

 

Pour les autres rôles, il y a un peu de tout. Ould Braham ne réussit pas à être aussi bitch que Grinsztajn en Olympia, mais son regard mutin la rend parfois bien snob et chipie tout comme il faut. C'est un peu dommage de la voir au milieu du corps de ballet, mais elle y brille, comme toujours. Nolwenn Daniel hérite du rôle de Laurence, la bonne amie, mais n'est pas aussi attentionnée et amoureuse que pouvait l'être Mélanie Hurel. Enfin Grinsztajn nous campe une Manon malicieuse et libertine puis désolée et souffrante. Plus je la vois, plus j'apprécie cette danseuse.... Leurs partenaires masculins font tous preuve de bonne volonté mais Nicolas Paul semble un peu dépassé par son étoile de partenaire. Duquenne, comme à son habitude, est toujours très charismatique.

 

Je sors la gorge un peu nouée. Les applaudissements sont très chauds et la moitié de la salle est debout. J'imagine déjà la foule en délire pour les adieux.... A dans deux semaines!

 


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