Théâtre du Châtelet
1er octobre 2013
Ballet National de Chine
Zhang Jian, Zhou Zhaohui, Li Jie, Wang Qi, Wang Hao
On peut osciller entre un nom de compagnie de l'Est un peu pipeau ou une troupe de kabuki version Chine en entendant le nom Le Ballet national de Chine. En creusant un peu plus, on trouve que l'école chinoise de danse est bel et bien véritable et à été formé par Makarova, une déserteuse russe (passée de l'Est à encore plus à l'Est). En se renseignant encore plus, on découvre que la compagnie vit dans des conditions folles, tous dans le même immeuble en face du théâtre, avec les cours qui s'alignent toute la journée.
Pour passer au spectacle, après la révolution culturelle, qui éradiqua les princes, cygnes et autres prêtresses du répertoire, il n'y resta que deux œuvres dont celle ci. Évidemment, une œuvre de propagande qui brasse tous les clichés, l'amour du drapeau, du chant patriote, du sacrifice pour la nation, du refus des sentiments personnels et, surtout du capitalisme.
C'est bien simple, il fait beau chez les communistes, les palmiers poussent dans une oasis qui ressemble fort au jardin d'Eden, le tout dans un décor d'un kitsch effrayant. Alors que les capitalistes vivent, telles des fourmis, dans le noir permanent (le soleil ne perce jamais les tours de La Défense, de la City ou de Wall Street), où les gens marchent, courbés sous l'échine du Dieu dollar et de la canne du méchant Propriétaire Terrien. À la fin, le soleil percera, les capitalistes mourront sous l'effort collectif et le sacrifice de l'individualisme, et la foule se réjouira.
Il y a quand même une histoire, une jeune fille s'échappe de son esclavagiste de maitre, qui pense ensuite la laisser morte, tuée par ses sbires. Elle rejoint alors le camp du bonheur, se joint à leur cause et retourne chez son maitre. Mais sa haine personnelle prend le dessus et elle lance l'assaut trop vite, tuant alors un travail de longue haleine. Ses amis se détournent de son regard. Vous pleurez? Moi aussi. Le méchant Propriétaire Terrien s'échappe par un rocher qui s’ouvre [oui le capitaliste est magicien].
Heureusement, le pardon arrive rapidement, et après une remise symbolique d'épée, voilà venu le temps de la guerre. Le chef, qui a soudainement perdu son arme, se sacrifie pour le reste de la légion, et se fait attraper par les méchants. Mais il ne meurt jamais et, tel superman, résiste aux balles, aux jets de pierre, aux armées de 20 soldats. Seul son sacrifice dans un bucher [soudainement apparu] l'achèvera. Le reste de la compagnie revient pour finir tout le monde et glorifier le sacrifice du défunt, pour ensuite célébrer la victoire.
Effectivement, comme Les Balletonautes nous le rappellent si bien, nous avons, sans doute pour la première fois, un ballet qui ne traite pas d'amour entre deux personnes, mais de l'amour de la patrie. Le patriotisme comme thème principal, j'avoue que je n'y avais jamais pensé. Même si le déjà très propagandiste Flammes de Paris traitait de la mort du bourgeois en plein ère communiste, il y avait en plus deux histoires d'amour. Ici, rien du tout.
Mais cela ne contrarie finalement pas la nature du ballet! Il y a quand même des pas de deux ou plus, des ensembles de corps de ballet, des variations et des instants de grâce et de virtuosité. Je trouve les hommes dans l'ensemble bien plus faibles dans leur technique, et ils cachent ces faiblesses dans des acrobaties époustouflantes. Chez les femmes en revanche, de réels talents qui doivent rendre très bien dans un répertoire plus habituel.
La danseuse principale nous offre de superbes sauts, ainsi que de nombreux développés d'une qualité époustouflante. La chorégraphie est malheureusement assez pauvre et j'ai l'impression que, comme la musique, elle se répète à l'infini. Mais je ne boude pas mon plaisir de voir une technique affirmée et une histoire qui, bien que navrante, se comprend sans problème. Les seconds rôles féminins sont également impressionnants, toujours avec cette même précision dans la technique,
Un ballet qui en est donc bien un, mais qu'il est important de remettre dans son contexte d'œuvre (quasi) unique à l'affiche d'un théâtre pendant une décennie, comme tout autre film de propagande. Un message du Parti via un média qui paraitrait occidental.
Théâtre du Châtelet
1er octobre 2013
Ballet National de Chine
Zhang Jian, Zhou Zhaohui, Li Jie, Wang Qi, Wang Hao
On peut osciller entre un nom de compagnie de l'Est un peu pipeau ou une troupe de kabuki version Chine en entendant le nom Le Ballet national de Chine. En creusant un peu plus, on trouve que l'école chinoise de danse est bel et bien véritable et à été formé par Makarova, une déserteuse russe (passée de l'Est à encore plus à l'Est). En se renseignant encore plus, on découvre que la compagnie vit dans des conditions folles, tous dans le même immeuble en face du théâtre, avec les cours qui s'alignent toute la journée.
Pour passer au spectacle, ce fut longtemps, après la révolution culturelle, qui éradiqua les princes, cygnes et autres prêtresses du répertoire, il ne resta que deux œuvres dont celle ci. Évidemment, une œuvre de propagande qui brasse tous les clichés, l'amour du drapeau, du chant patriote, du sacrifice pour la nation, du refus des sentiments personnels et, surtout du capitalisme.
C'est bien simple, il fait beau chez les communistes, les palmiers poussent dans une oasis qui ressemble fort au jardin d'Eden, le tout dans un décor d'un kitsch effrayant. Alors que les capitalistes vivent, telles des fourmis, dans le noir permanent (le soleil ne perce jamais les tours de La Défense, de la City ou de Wall Street), où les gens marchent, courbés sous l'échine du Dieu dollar et de la canne du méchant Propriétaire Terrien. À la fin, le soleil percera, les capitalistes mourront sous l'effort collectif et le sacrifice de l'individualisme, et la foule se réjouira.
Il y a quand même une histoire, une jeune fille s'échappe de son esclavagiste de maitre, qui pense ensuite la laisser morte, tuée par ses sbires. Elle rejoint alors le camp du bonheur, se joint à leur cause et retourne chez son maitre. Mais sa haine personnelle prend le dessus et elle lance l'assaut trop vite, tuant alors un travail de longue haleine. Ses amis se détournent de son regard. Vous pleurez? Moi aussi. Le méchant Propriétaire Terrien s'échappe par un rocher qui s’ouvre [oui le capitaliste est magicien].
Heureusement, le pardon arrive rapidement, et après une remise symbolique d'épée, voilà venu le temps de la guerre. Le chef, qui a soudainement perdu son arme, se sacrifie pour le reste de la légion, et se fait attraper par les méchants. Mais il ne meurt jamais et, tel superman, résiste aux balles, aux jets de pierre, aux armées de 20 soldats. Seul son sacrifice dans un bucher [soudainement apparu] l'achèvera. Le reste de la compagnie revient pour finir tout le monde et glorifier le sacrifice du défunt, pour ensuite célébrer la victoire.
Effectivement, comme Les Balletonautes nous le rappellent si bien, nous avons, sans doute pour la première fois, un ballet qui ne traite pas d'amour entre deux personnes, mais de l'amour de la patrie. Le patriotisme comme thème principal, j'avoue que je n'y avais jamais pensé. Même si le déjà très propagandiste Flammes de Paris traitait de la mort du bourgeois en plein ère communiste, il y avait en plus deux histoires d'amour. Ici, rien du tout.
Mais cela ne contrarie finalement pas la nature du ballet! Il y a quand même des pas de deux ou plus, des ensembles de corps de ballet, des variations et des instants de grâce et de virtuosité. Je trouve les hommes dans l'ensemble bien plus faibles dans leur technique, et ils cachent ces faiblesses dans des acrobaties époustouflantes. Chez les femmes en revanche, de réels talents qui doivent rendre très bien dans un répertoire plus habituel.
La danseuse principale nous offre de superbes sauts, ainsi que de nombreux développés d'une qualité époustouflante. La chorégraphie est malheureusement assez pauvre et j'ai l'impression que, comme la musique, elle se répète à l'infini. Mais je ne boude pas mon plaisir de voir une technique affirmée et une histoire qui, bien que navrante, se comprend sans problème. Les seconds rôles féminins sont également impressionnants, toujours avec cette même précision dans la technique,
Un ballet qui en est donc bien un, mais qu'il est important de remettre dans son contexte d'œuvre (quasi) unique à l'affiche d'un théâtre pendant une décennie, comme tout autre film de propagande. Un message du Parti via un média qui paraitrait occidental.