Théâtre de l’Athénée
17 décembre 2013
D’après La Grande Duchesse de Gérolstein d’Offenbach
Compagnie Les Brigands
Mise en scène : Philippe Béziat ; Direction musicale : Christophe Grapperon ; La Grande-Duchesse: Isabelle Druet ; Krak : David Ghilardi ; Le Baron Grog : Emmanuelle Goizé ; Le Prince Paul : Olivier Hernandez ; Schwartz : Olivier Naveau ; Le Baron Puck : Flannan Obé ; Schumacher : Geoffroy Buffière ; Le Général Boum : Antoine Philippot ; Fritz : François Rougier.
De retour à l’Athénée avec une tonitruante Grande-Duchesse, adaptée d’Offenbach. Les Brigands jouent avec les caractéristiques de l’opérette pour nous apporter un spectacle purement distrayant, loin des grandes productions du genre (de toute façon bien rares à Paris) mais qui est sans doute plus apte à créer un lien semblable avec son public que celui qui existait sous le second Empire.
Le programme nous apprend que sous Napo III les têtes couronnées se pressaient aux Variétés pour voir l’œuvre d’Offenbach et en sortaient bien satisfaits c’est tout à fait ça aurait ainsi dit Bismarck. Toute la satyre y est, une grande-duchesse qui gouverne son ridicule état germanique selon son bon plaisir et qui, le temps de l’opérette, a le temps de transformer un simple soldat en baron, comte et général en chef, puis de le remettre à son état initial, tout cela parce qu’il est bel homme, mais finalement marié. En parallèle, un prince parcourt les pays à la recherche d’une grande-duchesse à épouser, sous les ordres de Papa. Les généraux compétents sont écartés, la duchesse fait du populisme avec ses soldats, les symboles de la nation sont tournés en dérision : quoi de plus actuel un siècle et demi plus tard ?
Et pour montrer que les polémiques ont quand même évoluées légèrement, Philippe Béziat ajoute un travestissement dans sa mise en scène, en faisant de Wanda, la fiancée du beau soldat Fritz, un homme, Schwartz. Rien de choquant je vous rassure, quelques embrassades et de sous entendus, on reste loin de la revendication Mariage pour tous, et cela rajoute une touche moderne à l’ensemble des images sociales de la pièce.
La pièce ne se veut pas prétentieuse et la mise en scène est réduite au strict minimum suivant les habitudes des Brigands, laissant suffisamment d’accessoires et de décors pour permettre une gestuelle et des mouvements de grossière farce, mais sans jamais être vulgaire. Elle parait notamment moins absurde que le diptyque de la saison passée. Les musiciens répandus un peu partout sur la scène s’insèrent au décor, en trainant leurs pianos et contrebasses. Christophe Grapperon (dont la pilosité chabalistique m’était restée en tête depuis la dernière fois) se glisse là où il peut pour diriger efficacement et avec rythme ces neuf musiciens qui se répartissent avec succès la partition.
L’adaptation de l’opérette originale rend ici la théâtralité de l’œuvre encore plus frappante, l’alternance chant/parlé semble évidente même si l’on perd quelques airs en chemin. L’avantage d’une troupe française est avant tout la diction, aucun problème pour comprendre les chansons, dont les paroles restent d’ailleurs en tête à l’entracte et en sortant. Du rythme, de la gestuelle, des personnages bien typés, un dialogue simple et amusant, on y passe un bon moment.
Depuis leur dernier passage à l’Athénée, la troupe a dégoté une soprano de choix pour le rôle titre, Isabelle Druet, véritable chanteuse d’opérette dans son jeu, ses mimiques et sa voix amusante qui se fait applaudir à chaque air. Le nazillon Baron Puck du livide Flannan Obé, le grave Général Boum d’Antoine Philippit, la jeune voix du Fritz de François Rougier et le gros Prince Paul d’Olivier Hernandez encadrent la grande duchesse et entrainent les spectateurs.
Les chanteurs et les musiciens ne se font pas longtemps prier avant le bis, un air de l’œuvre d’origine, un Bonne Nuit qui rappelle un peu celui des enfants Van Trapp dans The Sound of music, et le public quitte la salle le sourire aux lèvres, après ce spectacle farfelu et drôle.