17 mar
2013 rimait avec Verdi et Wagner, 2014 rime évidemment avec Rameau. L’Opéra-Comique, plus que jamais attaché à l’histoire de la musique notamment ancienne, présentait donc une période Rameau.
J’ai ainsi pu assister à la pré-générale de Platée. La production est en collaboration avec le Theater an der Wien, sous la direction de William Christie qui a malheureusement dû déléguer le bâton à son adjoint Paul Agnew. Les Arts Florissants confirment leur talent sur la scène baroque internationale, tout y est très finement analysé et joué. Agnew, dont c’était une des premières séries d’opéra mis en scène, est attentionné et rassemble toute l’énergie pour un résultat gracieux et énergique.
La mise en scène de Carsen ne souhaite néanmoins pas mettre à l’honneur le baroque de l’œuvre. A l’opposé d’Ivan Alexandre et son Hippolyte et Aricie de Garnier qui soulignait et nous exposait du baroque authentique, le travail de Carsen, qui demande une attention quasi-totale au jeu de scène, empêche presque de savourer intégralement la musique. Seule les scènes de danse (bien ennuyantes) sont une excuse pour regarder le ballet des violons.
Le parti pris est, comme souvent chez Carsen, très intelligent, efficace et distrayant. Jupiter le playboy est ici Karl Lagerfeld en cherche d’une nouvelle égérie, rendant ainsi jalouse Junon / Coco Chanel. Mercure son fidèle acolyte est donc un agent de relation public. On voit passer une détestable Anna Wintour qui s’éloigne apeuré de l’horrible Platée. Ce nouveau cadre entoure très bien la trame narrative et on passe vraiment un bon moment. On retrouve quelques traces de Carsen déjà vues : la scène du défilé rappelle directement son exposition Impressionnisme et la mode, la dernière scène rappelle le début de sa Traviata de Venise. Mais après tout, ce n’est pas une honte, et cela contribue à l’efficacité du spectacle.
Concernant les chanteurs, j’ai été un peu déçu par Platée (Marcel Beekman), fort acteur mais trop peu musicien et sensible. La Folie (Simone Kermes) souffre d’être la seule non francophone de l’ensemble, mais cela lui donne finalement un caractère effectivement supra naturel au milieu des autres. Emilie Renard est adorable en Junon/Coco, mais son rôle est vraisemblablement trop court pour qu’on en profite tout à fait. Les palmes reviennent au Jupiter d’Edwin Crossley-Mercer, qui conjugue un talent d’acteur génial avec voix stable et forte, et au Mercure de Marc Mauillon, qui semble gérer la pièce dramatiquement et nous comble musicalement.
Disponible bientôt sur CultureBox