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Le Ballet de Vienne rend hommage à Noureev

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4 juillet 2013

Théâtre du Châtelet

Laurencia, pas de six de l'acte II
Before Nightfall
La Chauve Souris, pas de deux de l'acte II
The Vertiginous Thrill of Exactitude
La Belle au Bois Dormant, pas de deux de l'acte III
Rubis, pas de deux
Le Lac des Cygnes, pas de cinq de l'acte I
Black cake, duo
Le Corsaire, pas de deux
Bach Suite III

 

L'hommage de la communauté mondial du ballet à Noureev continue et s'inscrit dans le calendrier des rendez-vous annuels avec ici Les Etés de la danse. Sous le patronage d'un prestigieux board de mécénes, les invitations sont toujours intéressantes, ballet de Novossibirsk, Miamy City Ballet, Alvin Ailey ou encore Paul Taylor. Cette année, comme vous avez pu le voir sans doute à chaque station de métro depuis quelques mois, c'est le ballet de Vienne qui est invité. Il ouvre sa saison estivale avec un gala d'hommage Noureev qui est surtout l'occasion de découvrir l'ensemble de la compagnie dans un répertoire varié.

Alors pourquoi aller à ce gala, ou même pourquoi aller voir cette compagnie danser? Vienne, c'est quand même le règne de l'opéra, la Staatsoper locale présentant des saisons lyriques parmi les plus prestigieuses du monde. Le français Dominique Meyer a été nommé à sa tête en 2010 et, pratique commune, il invite un danseur français à diriger le ballet. Et pas n'importe lequel, celui qui fut sacré 'meilleur danseur du monde' (si cela veut dire quelque chose), celui qui fut un bébé Noureev avec la clique Platel-Guillem-Hilaire-…, bref Manuel Legris.

Je ne sais pas si c'est particulièrement grâce à lui, mais je l'espère, sa compagnie est rayonnante, pleine d'énergie et de talent. Si je m'attendais un peu à des danseurs poussiéreux qui livreraient des classiques académiques et s'écraseraient pieds, mains, mentons dans le reste du répertoire, j'ai finalement passé une très bonne soirée grâce à ce ‘reste du répertoire.’

Tout comme le gala du palais des congrès, cet hommage mélange des extraits de Noureev ou des œuvres et extraits qu'il a dansés, aimés ou programmés. Noureev a donné quelques chorégraphies à Vienne, dont un Don Quichotte et un Lac qui ne sont pas les mêmes qu'à Paris. Il a souvent dansé à Vienne, capitale qui l'avait adopté [Rudy fut naturalisé autrichien après sa défection] et y a importé quelques pas de Russie.

Le premier morceau est donc un extrait de Laurencia que Rudolf avait dansé au Kirov alors qu'il n'avait que 20 ans avec la prima ballerina locale Natalia Doudinskaïa, qui avait cru parmi les premiers au potentiel du jeune Tatare. Cet extrait ne m'a pas laissé de souvenir impérissable, mais j'ai bien aimé le format pas de six, qui change du pas de deux, permettant des pas de trois féminins et masculins. Le couple Marcin Dempc et Camille de Bellefon ressort particulièrement. Le lendemain, elle passait avec succès le concours externe du Ballet de Paris, l'atmosphère viennoise lui a donc été bénéfique!

Le couple principal montrait qu'il était près pour affronter les don-quichotteries des prochaines semaines, elle avait notamment de très jolis sauts plein d'énergie, j’y apprends d’ailleurs le nom du ‘saut Laurencia,’ castagnettes à l’appui.

J'ai trouvé le pas de la Belle lourd et sans grand intérêt, il ne réussissait pas à s'élever et elle avait du mal à tenir ses pointes complètement. Il faut aussi avouer que je suis de moins en moins fan de ce pas de deux, j'espere qu'une fois intégré au reste du ballet je le préférerais! Lui succédait le pas de deux de rubis, que j'ai trouvé bien plat à force de se vouloir pompeux et exubérant.

Enfin, le dernier extrait purement classique était celui du Lac des Cygnes version viennoise avec un pas de cinq que Rudy n'avait pas choisi d'intégrer à la version parisienne vingt ans plus tard. Et grand bien lui en a fait! J'ai trouvé cela platement ennuyant. La performance des danseurs était tout à fait correcte, mais ce morceau ne peut pas constituer en lui même un extrait, pas de points forts remarquables, de morceaux de bravoure ou de lyrisme. La variation de seconde femme fut particulièrement réussie et m’empêche de m’endormir tout comme la variation de Siegfried. Intéressant historiquement, je sens les débuts chorégraphiques timides de Noureev, qui explosera quelques années plus tard !

Fini les critiques, passons maintenant aux coups de cœur!
La Chauve Souris tout d'abord de Petit qui vient sauver la soirée après un Before the Nightfall intéressant et initialement musical mais qui s'éternise pendant vingt longues minutes. Roland Petit propose ici un pas de deux simple, qui va dans la lignée du Jeune Homme ou de Carmen, la femme est ici secrète et en position de force et finit, castratrice, par couper les ailes de son mari déguisé et volage.

La belle blonde Olga Esina joue cette femme sensuelle et mystérieuse et nous fait profiter de ses longues et superbes jambes qui ne sont qu'un moyen de plus pour attirer l'homme. Ses jambes tremblaient quand elle était sur pointes, et face à sa chauve souris de mari, j'aurais cru voir un malicieux cygne. En face, Shishov volait de place en place, plein de désir, finissant anéanti, s'écroulant comme James, il n'a pas réussi à attraper le fruit de ses désirs.

Le duo Black Cake de Von Manen continue sur cette lignée de couple qui s'attire et se repousse avec une chorégraphie amusante sur le thème des danses de salon. La femme appelle l'homme avec ses talons, puis ils s'embarquent dans un tango, mais il part de son coté, elle du sien, elle s’accroche à son dos, elle se hisse sur ses talons. Elle fait la minette, regarde ses ongles, il finit par la trainer en dehors de la scène. Quatre petites minutes délicieuses sur le Scherzo à la rose de Stravinsky qui ne sont pas sans rappeler l'humour de Bausch dans Kontakthof. À nouveau je regrette le gout de Van Manen pour les strings masculins noirs (visible notamment sous le pantalon transparent).

Je range également dans mes coups de cœur ce Corsaire si explosif qui a décidément toujours le même effet sur le public. Je me souviendrais longtemps des ´oh´ et des ´ah´ des spectateurs devant les tours acrobatiques et sportifs de Cherevychko ainsi que des applaudissements en rythme lors de son manège. Pour peu on se serait cru en Russie. Face à lui, Yakovleva me donne les mêmes impressions que sa Kitri en décembre, une sensibilité apparente et une technique pointue. Le cocktail des deux est un pas de deux mémorable.

Des deux pièces restantes, j'ai préféré le Forsythe (obviously) avec ses tutus tout plats qui semblent un pied de nez aux pas classiques. Les positions rappellent Balanchine, mais avec la petite touche Forsythe qui rend tout de suite le ballet délicieux. La musique qui appelle la coda, les successions de placements, de pirouettes, de jambes qui s’étirent, de bras qui se courbent. Certes les lignes ne sont pas aussi droites et impressionnantes qu’à l’Opéra, mais les cinq danseurs, dont le malicieux Kimoto, ont su m’entrainer dans la musique de Schubert pour quelques instants ravissants.

 

Cette longue soirée s’achève par un clin d’œil à Neumeier que Noureev avait programmé pour l’Opéra de Paris : Bach Suite III. Neumeier a toujours su choisir sa musique, et depuis les extraits de Petit et Balanchine que j’ai vu, je sais que Bach est un choix que j’adore pour la danse. Ici je commence un peu à fatiguer, mais j’apprécie un super travail des Viennois, la chorégraphie me rappelle dans l’ensemble la Troisième de Mahler, mais en moins imposant. Cette pièce me parait plus lyrique, plus douce et moins complexe. C’est également Olga Esina qui illumine cette pièce, apportant douceur et légereté pour finir la soirée.

 

Chaque pièce commençait par quelques images de la troupe en répétition nous présentant les différents interprètes et les répétiteurs, comme Manuel que l’on aperçoit de temps en temps : le savoir Noureev continue à être enseigné !


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